Témoignage « Somnambule » - 5 novembre 2015/ St Hilaire du
Maine, dans le cadre la la Saison Culturelle de l’Ernée.
Il y a des rêves que l’on fait
parfois sans s’en souvenir au réveil, et qui nous reviennent au cours de la
journée, ou même des semaines qui suivent, comme si ces rêves s’étaient
inscrits dans notre mémoire à notre insu, et qui se manifestent à notre
conscience au moment où l’on s’y attend le moins, sous la douche, en voiture,
en achetant du pain… Le spectacle « Somnambule » est de l’ordre de
ces rêves-là : il me revient régulièrement en mémoire, par flash, et
presque chaque fois sans lien évident avec ce que je suis en train de faire à
ce moment-là. Il est de ces spectacles qui perdurent.
Je revois Philippe Languille entrer
en scène et adresser la parole à son public de la manière la plus simple qui
soit. Sans doute parce qu’il ne cherche pas à fabriquer quoi que ce soit au
moment de cette prise de parole. Il ne triche pas. Il vient nous parler, tout
simplement, à nous qui sommes là, devant lui, à ce moment précis. Et cette
simplicité est telle qu’on oublie qu’il s’agit d’un texte écrit, il nous semble
que cette parole s’invente au moment même où elle est dite.
Comme dans le monde des rêves, j’ai
été emporté par un récit où les lieux et les temporalités se modifient sans
même que j’en sois conscient. De la salle de spectacle je me suis retrouvé dans
la bibliothèque du comédien, chez son psychanaliste, dans la chambre d’hôpital
de son père… Ce comédien-là a la faculté de nous prendre par la main et de nous
embarquer avec lui sans aucun effort.
En y repensant, je crois que
« Somnambule » ne parle pas que de somnambulisme, que le fond de ce
spectacle est un peu plus vaste. De mon point de vue, il s’agit avant tout d’un
homme qui se bat contre sa propre nature. Malgré certains épisodes hilarants,
cet homme vit son somnambulisme comme un défaut, une maladie, un poids qu’il
subit et fait subir à ses proches. C’est un véritable combat contre une maladie
qu’on nous raconte. Et ce combat s’avèrera inutile, il faudra apprendre à
déposer les armes. S’il y avait un thème à dégager de se spectacle, ce serait
celui d’apprendre à s’accepter soi-même. Et on retrouve ici la magie de toute
biographie : on parle d’un homme précis, et en parlant d’une histoire unique
on en vient à parler de chacun d’entre nous. Parler de soi pour mieux parler de
tous, partir du détail pour toucher à l’universel : c’est ce qui se passe
avec « Somnambule ».
Maxime DUBREUIL / Comédien.